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La Lettre du
Mardi n°
299 A et P du 19.12.2023
Expédiée le 19.12.2023
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Un ministère des sports à la
ramasse
Une refondation du
mouvement sportif s’impose EN URGENCE
Patrick Bayeux
Consultant, Enseignant
chercheur, Docteur en sciences de gestion.
Texte extrait de son
journal «Décideurs du sport»
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Il y a 10 ans
le mouvement sportif dans son projet pour le sport français et pour le CNOSF
formulait une ambition : « passer d’une nation de sportifs à une nation
sportive » Une clé : « rénover le modèle sportif
Français », un rêve, « déposer une candidature pour l’organisation des jeux »,
« le meilleur moyen de fédérer toutes les énergies et de les mettre au service
de ce projet. »
10 ans après
le mouvement sportif français est en pleine crise.
Alors qu’à moins de 400 jours des Jeux Olympiques, toutes les énergies
devraient être mobilisées pour faire de cet évènement historique une grande
fête nationale et surtout un tremplin pour « Faire du sport un élément central
d’un projet de société » c’est la débandade.
C’est la débandade. À qui la faute ?
Est-ce
un problème d’institution, de gouvernance, de statut ?
Est-ce un problème de personnes, de générations, est-ce la fin d’un système
dans lequel « il n’est plus possible de régler
les problèmes en interne » ?
Est-ce la « caisse raisonnante » des jeux qui a fait que les médias ont
commencé à mettre leur nez dans les affaires et les archives du sport Français
?
Un peu tout ça sans doute, mais cette crise profonde était pourtant prévisible.
Cette crise profonde était pourtant prévisible.
Il
y a un peu plus de 3 ans (le 12 mai 2020) précisément, j’écrivais cet article «
quel sport en 2030 ? 2 scénarios post Covid 2019.
Je posais 2 scénarios en
sortie de crise Covid :
-- celui l’implosion explosion
-- celui de la raison
« C’est la capacité des acteurs à
s’organiser pendant cette période cruciale qui déterminera les scénarios de
sortie de crise. » Je concluais : « Les acteurs du sport sont-ils capables de
se mobiliser pour se réinvente ? A eux de choisir leur scénario ».
6 mois après le 10 novembre 2020, je faisais le constat de l’explosion du
modèle sportif français du déconfinement au reconfinement : les 6 mois qui ont
marqué l’explosion du modèle sportif français, un
ministère des Sports à la ramasse « Nous craignons que le Ministère
se contente d’un rôle de super-technicien : un peu juste pour faire face aux
éléments et tenter de les dominer… un jour. » Je fustigeais un appel aux dons
(l’opération « Soutiens ton club ».) « la supplique du mouvement sportif».
Quant à la gouvernance du sport, je dénonçais des collectivités territoriales «
Incapables de tenir une position commune, souhaitant que chaque niveau de
collectivités territoriales ait une place d’honneur au sein de la conférence
régionale du sport et au sein de la conférence des financeurs » et un CNDS
territorial bis avec 10 fois moins de moyens qui coûtera 10 fois plus cher.
Je m’interrogeais « Les acteurs du sport peuvent - ils se rassembler en vue de
2024 pour pouvoir encore croire dans un modèle sportif, porter une vision
commune, faire du sport un bien commun ? »
En mai 2021 je faisais le constat que « La crise a mis en exergue les
faiblesses du modèle sportif français et a accéléré les tendances. Une approche
générationnelle (babyboomers, génération X Y Z et alpha) est indispensable et
permet d’anticiper les effets de la crise sur la reprise dans les clubs. Le
centre de gravité du club devra bouger pour donner naissance à un club hybride
entre le club barbecue et le club « service / garderie » . (Mai. 04, 2021 Clubs
sportifs : quelle reprise après la crise ? une approche générationnelle
s’impose)
Depuis le mouvement sportif s’enfonce faute de vision, son navire amiral a fini
par couler et … tout ceci était prévisible. (Sep.16.2022 7:00 Faute de cap le
CNOSF tourne en rond s’enfonce et prend l’eau).
Incapable de porter une vision commune, le sport français s’est fragmenté et le
CNOSF a coulé. Incapable de porter une vision commune, le sport français s’est
fragmenté pour laisser place à une organisation de plus en plus éclatée, dénuée
de vision, de repères stables et de représentations communes. Et, pourtant
l’ANS a été créée pour porter cette vision commune pour faire du sport un enjeu
sociétal, un service public un bien commun (cf schéma ci dessous issu du
rapport nouvelle gouvernance).
C’est raté.
Côté CNOSF, prémonitoire toujours dans cet article dans
lequel j’écrivais « Toute cette période de tâtonnement va-t-elle maintenant
prendre fin ? Nous sommes convaincus que le CNOSF doit se repenser dans cette
nouvelle gouvernance., mais aussi accompagner les fédérations pour penser le
sport dans un monde qui a profondément changé. Est-ce encore possible ? Est-ce
déjà trop tard ? Le CNOSF a son destin en main pour retrouver une boussole à
moins de 2 ans des jeux . » la suite on la connait …
Sur les territoires, les CROS et CDOS constatent les dégâts de la crise
nationale. Privés de moyens, ils ne peuvent agir. Je rappelle que j’étais
contre le transfert de l’ex part territoriale du CNDS aux fédérations. Dans mon
esprit l’ex part territoriale du CNDS revenait au mouvement sportif sur les
territoires. Aujourd’hui sur les territoires, les CROS et CDOS n’ont plus aucun
levier pour agir, ce qui pose désormais la question de leur plus-value.
Le sport français vit sa crise des corps intermédiaires :
fédérations, mouvement sportif, CNOSF, …
Sur les affaires dans les
fédérations, si on avait, comme c’était
préconisé dans le rapport nouvelle gouvernance du sport mis en place « un
contrôle de l’éthique des fédérations par le Comité National Olympique et
Sportif Français (CNOSF), ou encore leur notation externe par des agences
indépendantes ainsi que le préconise le Conseil de l’Europe, pour constituer
les fondements d’un nouvel équilibre constitutif d’une opportunité, autant que
d’un défi : « les choses auraient peut-être été différentes.
Sur les clubs, la période 2020 2024 aurait du
être une opportunité historique pour repenser leur place dans un modèle en
pleine transformation. La ministre l’a compris pour ce qui relève de son
périmètre, elle qui a indiqué dès juillet 2023 la nécessité de « réinventer »
les missions de la direction des sports du ministère. • Juil.18 2022 8:20 La
feuille de route du Sport Français se dessine.
L’ANS faute d’avoir comme ambition de
porter une vision et de mettre en relation l’ensemble des acteurs et des corps
intermédiaires, est aujourd’hui cantonnée à être le bras armé du ministère des
sports.
De son côté, le CNOSF s’est affaibli. Rongé par
les crises, incapable de penser sa refondation au regard des évolutions
sociales et de la nouvelle gouvernance, il a laissé la place vide. A quoi sert
le CNOSF aujourd’hui ? Au niveau national, les fédérations ont-elles encore
besoin du CNOSF, elles qui traitent aujourd’hui en direct avec le ministère des
sports d’une part et d’autre part avec l’ANS ?
Dans cette décomposition progressive, chacun y
a trouvé son compte. … jusqu’aux affaires qui ont sorti le sport de son entre
soit, de sa torpeur préolympique.
Des ministres peu médiatiques, un CNOSF qui tourne en rond,
un COJO qui s’affaire , une agence qui administre pour le compte du ministère,
… La nomination de AOC comme ministre des Sports et des JOP a totalement changé
la donne.
Aujourd’hui
c’est la ministre des Sports qui porte seule la vision du sport Français.
Présente sur tous les sujets, investie d’une mission, elle incarne l’autorité
de l’Etat, elle porte sa vision, se retrouve à jouer le rôle de déontologue du
sport et quelque part (malgré elle ?) prendre une posture de moralisatrice.
En l’absence de structure indépendante de contrôle de l’éthique et de la
transparence, elle est aujourd’hui interpellée dans les médias y compris sur
des sujets internes comme c’est le cas pour la FF Judo dont un collectif n’a
pas hésité à la saisir directement, les maires de Bordeaux et d’Annecy
également pour des affaires totalement interne aux instances sportives.
Son appétence à vouloir régler rapidement tous les problèmes comme celui de cet
enfant sourd qui ne trouvait pas de club de basket, ou sa promesse faite au
petit Kenzo de vivre un moment « magnifique », l’an prochain, durant les JOP, de
donner son avis sur le cas MBappé … la positionne comme la figure du proue du
sport français quitte à court-circuiter les « corps intermédiaires ».
Cette concentration des pouvoirs et des fonctions ne fait qu’accentuer la crise
de représentativité que connaît le sport Français. Une gouvernance partagée à
responsabilité répartie … était la promesse de la nouvelle gouvernance du
sport. Aujourd’hui, non seulement les responsabilités ne sont pas réparties
mais en plus la gouvernance n’est pas partagée en raison de la faiblesse des
corps intermédiaires.
La refondation du mouvement sportif est urgente
Les
défis sont nombreux (fédérations de licenciés ou de pratiquants, renouvellement
générationnel, modèle économique, représentativité, engagement bénévoles, ….)
nous les détaillerons dans un autre article, mais la première chose que devra
faire le / la future président du CNOSF est bien d’engager et très rapidement
des états généraux du mouvement sportif.
Certes pour le CIO la priorité ce sont les jeux, pour le CNOSF c’est la
pérennisation des financements, mais pour le mouvement sportif, c’est la place
du club.
Est-ce que la nouvelle présidence du CNOSF saura jouer cette valse à 3 temps ?
Le slogan de la candidature à Paris 2024 était « la force d’un rêve ». Là on
est plutôt dans une phase cauchemardesque pour le sport français. « Les
cauchemars, c’est ce que les rêves deviennent toujours en vieillissant. »
Romain Gary. Il est temps de se réveiller.
Patrick BAYEUX FIN
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